Évaluation finale du Programme intégré de prévention, de sensibilisation, de renforcement de capacités et de prise en charge

Évaluation finale du Programme intégré de prévention, de sensibilisation, de renforcement de capacités et de prise en charge des brûlures œsophagiennes dues aux ingestions accidentelles de soude caustique au Mali et en Côte d’Ivoire

La Chaîne de l’Espoir, association française fondée en 1994. Elle a pour vocation de renforcer les systèmes de santé pour donner à chacun les mêmes chances de survie et de développement et son approche est la suivante :

• Soins et chirurgie, afin de répondre aux besoins les plus urgents des enfants et de leurs mères
• Formation et transferts de compétences aux équipes locales grâce à notre réseau international d’experts dans tous les domaines de la chirurgie
• Construction et équipement de structures hospitalières adaptées aux besoins locaux
• Prévention et dépistage dès le plus jeune âge, notamment dans le cadre de programmes de santé à l’école.

Résumé du projet

Comparée aux grandes endémies que connait la région, l’Ingestion de Soude Caustique (ISC) par les enfants est une cause méconnue de morbidité et de mortalité infantile. Les brûlures caustiques sont le plus souvent d’origine accidentelle et sont dues à l’ingestion par les enfants de produits liquides ou solides comportant de très fortes doses de soude caustique. La très grave maladie dont souffrent les enfants qui ont ingéré de la soude caustique est la sténose caustique de l’œsophage (SCOE).

L’utilisation domestique de cette substance hautement toxique est largement répandue dans le secteur informel en Afrique de l’Ouest. Ce sont des activités qui concernent principalement des femmes, dans des milieux à très faibles revenus, particulièrement pour la fabrication artisanale de savon, la teinture, la coiffure et les préparations culinaires (potasse alimentaire). Ces produits sont semblables à des produits inoffensifs (eau, sucre, …) et sont stockés dans des récipients ou des lieux qui ne sont pas sécurisés et qui ne permettent pas de les identifier comme dangereux. De plus, les déchets et eaux usées issus de la production sont le plus souvent jetés à même la rue ou dans les fosses publiques faute de systèmes d’évacuation et de traitement appropriés.

Au Mali et en Côte d’Ivoire, il n’y a actuellement aucune étude de prévalence nationale concernant la PEC des SCOE, les seules données disponibles sont des données hospitalières. Au Mali, une étude a été réalisée au service de chirurgie thoracique et cardio-vasculaire de l’Hôpital du Mali de Bamako de 2012 à 2016. L’étude montre que, pendant cette période, 60 patients ont été suivis pour une SCOE pour un total de 3 115 hospitalisations, soit une fréquence hospitalière des SCOE de 1.93% et 85% de patients sont des enfants de 15 ans ou moins. Cependant, avec la concentration des structures sanitaires spécialisées dans la capitale et l’éloignement des ménages, ce chiffre est peu représentatif de la situation réelle, car de nombreux patients n’arrivent pas dans le service. En Côte d’Ivoire, s’il est vrai que la morbidité chez les enfants est dominée par les infections respiratoires, la malnutrition et les anémies, il n’en demeure pas moins que les intoxications représentaient, en 2018, 8,50% des admissions dans les services d’urgence et réanimation pédiatrique dans les trois principaux CHU (Treichville, Yopougon, et Cocody à Abidjan) et que 70% des victimes avaient moins de 5 ans.

Le projet cible sept communes réparties au Mali et en Côte d’Ivoire : il s’agit des Communes III, V et VI du district de Bamako et la Commune Urbaine de Ségou ; dans le district d’Abidjan, il s’agit des communes d’Abobo, de Yopougon et d’Adjamé. Ces communes sont de manière générale fortement impactées par la pauvreté et l’essentiel des utilisateurs / revendeurs de soude caustique travaillent dans le secteur informel.

Le projet se déroule sur une période de 36 mois et a démarré en janvier 2020 pour se conclure en décembre 2022. Il s’adresse d’une part aux populations qui vivent et/ou travaillent dans les communes retenues mais aussi aux autorités du secteur de la santé. Le projet propose une approche intégrée à même de traiter la question dans son ensemble : sensibilisation des populations, des autorités et des professionnels des secteurs concernés, plaidoyer auprès des autorités de la santé, renforcement des capacités matérielles et des compétences des structures de santé pour et via la prise en charge médicale des sténoses caustiques de l’œsophage, y compris chirurgicale et psychosociale, et renforcement des capacités des professionnels utilisateurs de soude caustique. Le projet est mis en œuvre avec 4 partenaires principaux :

• L’Hôpital du Mali (HdM) (Mali)
• La Fondation Terre des Hommes Lausanne FTdH (Mali)
• L’Hôpital Mère Enfant de Bingerville (HME) (Côte d’Ivoire)
• La Croix Rouge de Côte d’Ivoire (CRCI)

Les partenaires FTdH et CRCI ont été sélectionnés et évalués sur la base de leur capacité à gérer ce type de projet. Tous deux possèdent une expérience avérée dans la gestion de projets de type cofinancement institutionnel, ainsi que dans les activités et approches portées par le projet.

Par ailleurs, au niveau institutionnel, les Ministères de la Santé du Mali et de la Côte d’Ivoire ont manifesté leur adhésion et leur volonté de coopération pour faciliter la réalisation d’un tel programme.

Objectifs de l’évaluation

La Chaîne de l’Espoir poursuit un double objectif à travers cette évaluation. Il s’agit d’une part d’évaluer l’atteinte des objectifs et résultats quantitatifs et qualitatifs visés par le « Programme intégré de prévention, de sensibilisation, de renforcement de capacités et de prise en charge des brûlures œsophagiennes dues aux ingestions accidentelles de soude caustique au Mali et en Côte d’Ivoire ». D’autre part, au-delà des résultats du projet, l’évaluation permettra d’analyser et questionner le mode d’intervention, les processus et les pratiques mises en œuvre, afin notamment d’améliorer les interventions futures.

En effet, pour répondre à la problématique des ISC au Mali et en Côte d’Ivoire, La Chaîne de l’Espoir a opté pour une approche intégrée permettant d’intervenir à différents niveaux, de la prévention/sensibilisation à la prise en charge chirurgicale et au suivi post-opératoire en passant par le renforcement des compétences et la formation des personnels de santé. Ce mode d’intervention étant relativement nouveau au sein de l’organisation, il est intéressant d’évaluer en quoi l’approche intégrée retenue pour la mise en œuvre du projet a été pertinente, efficace et efficiente au regard des enjeux du programme. Cependant, l’évaluation devra veiller à ne pas simplement caractériser l’approche intégrée mais effectivement analyser sa pertinence, son efficacité, son efficience, au regard des enjeux du projet.

En outre, il est attendu de l’évaluation une analyse des conditions de mise à l’échelle des actions de ce programme qui aurait vocation à être répliqué à d’autres zones du Mali et/ou de la Côte d’Ivoire.

En termes de méthodologie, il est attendu une évaluation de type participatif favorisant l’implication des principales parties prenantes, notamment les partenaires de mise en œuvre qui forment le comité de pilotage du projet et les familles et enfants qui sont les destinataires finaux des actions mises en place.

Les recommandations devraient idéalement porter sur les conditions de mise à l’échelle du projet, les moyens de renforcement des relations avec d’autres acteurs, notamment institutionnels, les pistes pour renforcer la participation des familles et enfants dans la mise en œuvre du projet, ainsi que sur tout autre point que l’équipe évaluatrice jugera pertinent.